Mieux apprendre les sons et le sens: la phonologie au service du vocabulaire [Podcast]

Est-il possible de mieux apprendre une langue étrangère en faisant plus attention aux manières de prononcer certains mots ? Il semblerait que l’intégration de la phonologie dans la didactique des langues étrangères offre des perspectives positives en ce sens. En témoigne la thèse de Nathalie Dherbey Chapuis (UniFR) qui propose des pistes didactiques concrètes pour aider les apprenant·e·s à faire des liens entre les sons et le sens. Entretien.

La phonologie, ce n’est pas qu’une question de son. Cette discipline de la linguistique se penche également sur le rôle des sons dans la fabrication du sens, tant sur le plan de la perception que de la production des mots dans une langue. Et quand on est en train d’apprendre une langue dont on peine à distinguer les nuances sonores, il devient alors compliqué de comprendre ce qu’on nous raconte. Pire, l’espoir de parvenir à reproduire ces mots pourrait en décourager plus d’un·e. Ainsi, pour un·e germanophone qui apprend le français, faire la différence entre « je / che » ou « on / an / un » peut s’avérer fastidieux.

Si on ne perçoit pas le son correctement, si on n’arrive pas à lier le son au bon élément lexical, (…) à la bonne valeur sémantique, alors obligatoirement on est embêtés dans sa compréhension.

Nathalie Dherbey Chapuis

Deux méthodes d’apprentissage qui fonctionnent

Est-il possible de faciliter la vie des apprenant·e·s du français en se concentrant sur la perception et la prononciation de certains sons dans une langue étrangère ? C’est précisément ce qu’a cherché à comprendre la thèse de doctorat de Nathalie Dherbey Chapuis (Maitresse-assistante à Université de Fribourg). Après nous avoir expliqué comment elle conçoit la « didactique de la phonologie », elle nous raconte comment elle a travaillé la perception et la production de sons du français avec des élèves de l’école obligatoire en Suisse. Elle a, entre autres, développé deux séquences didactiques qu’elle a testées en classe de français langue étrangère en les enseignant de manière explicite à certain·e·s élèves et de façon implicite à d’autres. L’approche explicite consiste à expliquer les objectifs, règles et techniques d’écoute et de prononciation ; l’approche implicite invite les élèves à utiliser fréquemment des mots contenant des sons complexes (car absents de leur langue première), sans thématiser les aspects phonologiques.

Entretien avec Nathalie Dherbey Chapuis

Les résultats, que Nathalie Dherbey Chapuis aborde dans le podcast, sont surprenants, dans la mesure où les deux approches, implicites et explicites, ont des effets bénéfiques sur les apprentissages. En guise de conseil aux enseignant·e·s de français langue étrangère ou seconde (FLE/S), la chercheuse encourage les écoles et les enseignant·e·s à distiller le travail de la prononciation, tout au long des activités communicatives ou du travail de l’orthographe.

Ces représentations phonologiques sont vraiment au cœur du fonctionnement du système linguistique, et aujourd’hui, en didactique du FLE/S, on a tendance à ne pas les enseigner

Nathalie Dherbey Chapuis

Une approche accessible à tou·te·s les enseignant·e·s

Si les enseignant·e·s peuvent se sentir démuni·e·s quand il s’agit de transmettre des manières d’entendre et prononcer des sonorités complexes, Nathalie Dherbey Chapuis suggère que la méthode implicite est à portée des tou·te·s, car elle n’exige pas de connaitre les moindres recoins de notre appareil phonatoire. En partant du principe qu’on apprend plus facilement des mots qu’on parvient à prononcer plus ou moins fidèlement, la démarche didactique peut s’avérer particulièrement bénéfique pour les apprentissages, notamment pour l’acquisition du vocabulaire. Mais la phonologie n’est pas forcément un but en soi. La chercheuse recadre son étude dans le champ plus global d’une finalité communicative :

On n’a pas besoin que nos apprenants prononcent comme des natifs. On a besoin qu’ils aient une représentation qui soit fonctionnelle (…) et compréhensible

Nathalie Dherbey Chapuis

Nathalie Dherbey Chapuis n’est pas en panne d’inspiration pour la suite. Comme elle nous le raconte en fin de podcast, son projet actuel porte notamment sur l’acquisition de sons en FLE/S chez des élèves allophones très jeunes.



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Photo by Guillaume de Germain on Unsplash

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